Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/02/2013

Henri CAILLAVET, un Législateur hors du commun.

 

Henri Caillavet, un législateur hors du commun

Par Henri Caillavet Directeur de l’observatoire de la vie politique et parlementaire

Le Monde 27 Février 2013

De la IVe, sûrement ; c’était celle qui lui avait permis, dès le 2 juin 1946, à 32 ans, de représenter le Lot-et-Garonne à la seconde Constituante. L’avocat et jeune député radical, ancien « passeur » d’armes pour les républicains espagnols, puis ancien résistant et ancien interné, eut la lourde responsabilité, deux ans après la Libération, dans un cénacle très confidentiel, celui de la franc-maçonnerie, de jouer le rôle de procureur face à certains quémandeurs, tentant de faire oublier leur port de la francisque. Henri Caillavet se fit des amis, mais dès lors beaucoup d’ennemis.

La « proposition de loi » devient, déjà, son arme de prédilection : sept jusqu’en 1951, puis une rafale de vingt-quatre textes jusqu’en 1956 ! Mais dans cette armurerie législative, certains exposés des motifs annonçaient déjà le législateur et le futur rapporteur qu’il serait dans la République suivante : législation sur l’avortement, régimes matrimoniaux, divorce par consentement mutuel, etc… Comme si l’instinct de survie en politique commande à tout élu de ne compter que sur lui-même, Henri Caillavet se constituait déjà un solide portefeuille d’idées à redistribuer, de débats de société à provoquer avec des « coudées franches ».

LA VE RÉPUBLIQUE SERA SON BONHEUR

De la IVe République, le député du Lot-et-Garonne, en extrayait encore les jours heureux et ceux qui l’étaient moins lorsqu’on exerce des fonctions ministérielles : à l’outre-mer, en 1953 dans le gouvernement de René Mayer, mais surtout trois fois dans les gouvernements de Pierre Mendès France, auprès d’Edgar Faure, puis de François Mitterrand, en 1954 et 1955. La fin de la belle histoire du radicalisme herriotiste, comme pour d’autres socialistes, démocrates-chrétiens, libéraux, ou républicains de progrès, se terminait en novembre 1958 ; ayant refusé la confiance au général de Gaulle et voté contre les pleins pouvoir, Henri Caillavet subissait le verdict des urnes. Redevenu avocat de plein exercice, il assurait loin des hémicycles son indépendance financière, celle qui allait lui permettre de ne devoir rien à qui que ce soit lorsque les « avis de tempête » ouvriraient de nouveau la voie au débat démocratique.

La Ve République a commencé en 1967 pour Henri Caillavet lorsque, suppléant deJacques Bordeneuve devenu député du Lot-et-Garonne, il lui succède au Sénat. Et finalement, la Ve sera son bonheur. A la Haute Assemblée, sa force de travail se moque du cumul des mandats ; au Parlement européen, il ferraille avec les Anglais pour défendre la PAC et bataille avec succès contre la technocratie bruxelloise ; dans le Lot-et-Garonne, au conseil général ou à Bordeaux au conseil régional, il mesure les besoins ruraux et y fait redistribuer tout ce que les fonds structurels peuvent apporter à l’accompagnement de la modernité et du changement, tout en observant qu’« au pas des bœufs « , comme il disait si bien, les réformes sont toutes aussi bien menées à terme, et le plus souvent avec plus de qualité ; et dans les Hautes-Pyrénées, dans son village de Bourisp dont il est maire, il puise le bon sens et en retient toute la modestie.

Difficile de se faire une place, néanmoins, à la Haute Assemblée ; patient, indépendant d’esprit, mais radical loyal dans son groupe (celui de la Gauche démocratique), le nouveau sénateur de Lot-et-Garonne ne tarde pas à piaffer d’impatience d’autant que la « Rue de Valois » passe des mains de Maurice Faure, René Billières et Robert Fabre, à celles de JJSS, turbulent député de Lorraine, pas du tout ami de la maçonnerie, mais précurseur, comme Henri Caillavet, de bien des réformes à venir. Participant au programme commun de la gauche, le sénateur voit, avec d’autres, s’effondrer l’espoir de la victoire de François Mitterrand en 1974.

Henri Caillavet scrute l’horizon ; bouché sans doute tant la brume est épaisse et comme, cette année-là, le mandat de sénateur qu’il conquiert – à l’époque de neuf ans – donne du temps au temps, il suffit au chasseur de choisir la bonne fenêtre de tir… et de se rendre utile en servant comme plat de résistance à ses collègues sénateurs le menu des années 1946-56. Il ne cherche pas à s’élever dans la hiérarchie sénatoriale ni dans l’espace réservé aux « dignitaires ». En 1972, Henri Caillavet s’était mesuré, avec succès, à l’audiovisuel public en présidant la commission sur la publicité clandestine. Orateur et montant à la tribune, le plus souvent sans notes, il captait l’auditoire et se frottait les mains lorsque la démonstration avait fait mouche et basculer dans son camp un collègue de la droite ou de l’extrême gauche ! Une fois rapporteur de la loi Veil et de celle sur le divorce par consentement mutuel, en 1974 et 1975, le sénateur change de braquet et accélère ; il fait voter sa propre proposition sur les greffes d’organes, qui devient la loi Caillavet.

LE SEUL BUT DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL

Loin des systèmes d’alliance et des luttes de pouvoir le voilà, au Sénat, un vrai législateur, usant, sans ménagement, du pouvoir de contrôle législatif sur le gouvernement ; respecté de tous, du parti communiste au RPR, parce que lui-même respectait les autres et que ses plaidoiries des causes justes avaient pour philosophie – comme il se plaisait à le clamer – que l’on était « intelligent aussi avec la tête des autres » ; respecté de l’administration entière du Sénat et des fonctionnaires qui l’ont assisté et conseillé, il poussait davantage l’esprit de réforme dans le seul but humaniste et républicain de l’intérêt général.

Comme si l’avocat s’imposait une « obligation de résultat », ses combats devaient réussir… et ils réussirent sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing, puis sous celui de François Mitterrand : de la lutte contre la fouille des véhicules et de son succès au Conseil constitutionnel, de sa proposition d’un tribunal de l’informatique, de ses propositions de réformes constitutionnelles, de celle, en 1980, de la« proportionnelle municipale majoritaire », de l’enquête sur le « fichier des juifs », ou de la guérilla sans répit sur les atteintes aux libertés publiques ou à celles confisquant l’expression libre sur les ondes ; bataillant avec succès et faisant reculer le pouvoir pour défendre les radios locales, la télévision future câblée, les fonds de création télévisuelle, la transparence et le pluralisme de la presse, le droit des automobilistes. Et surtout, avant tout le monde – et parfois face à une gauche timorée, conservatrice – ses propositions de loi très médiatisées, courageuses à l’époque, faisant l’objet pour certaines d’entre-elles de débats sans vote (!) : la réforme de l’internement psychiatrique, l’insémination artificielle, la dépénalisation de l’homosexualité, le droit de vivre sa mort (avec son collègue Jean Mézard, le père de l’actuel président du groupe RDSE).

Le législateur vrai, authentique, aidé bien évidemment par ses convictions philosophiques humanistes (33e au Grand Orient) et de libre penseur était avant tout généreux, rigoureux avec lui-même ; sa force de vie pour les autres était au Parlement, et lorsque la rumeur courut qu’il pouvait devenir un ministre d’ouverture de Valéry Giscard d’Estaing, ceux qui travaillaient à ses côtés ou d’illustres collègues sénateurs de tous bords, peuvent témoigner encore que ses convictions étaient à gauche.
Le républicain réformateur de la société avait néanmoins ses contradictions métaphysiques. Devenu Européen convaincu jusqu’à aller sur la liste de Simone Veil aux élections européennes de 1979, le réalisme politique l’avait-il emporté sur son vote du 9 juillet 1957 contre la ratification du traité de Rome ? En contradiction encore et cette fois avec l’humanisme des loges, pourquoi n’avait-il pas accompagné Robert Badinter pour l’abolition de la peine de mort ?

Henri Caillavet a eu, au Sénat, un appui essentiel : celui de son président, Alain Poher, accordant à l’institution, à la fin des années 1970, un nouveau périmètre d’investigation et d’initiative législative, celui de la défense des libertés, associée à l’épanouissement de libertés et de solidarités nouvelles.
Mais le suffrage universel même indirect est sévère avec l’idée de progrès, de transformation de la société. Quittant la tribune en septembre 1983, Henri Caillavet, qui avait siégé à la CNIL, prolongea sa participation à la vie publique quelques années encore au sein d’une autre autorité administrative indépendante, le Comité national d’éthique, puis se consacra à l’association du droit de mourir dans la dignité, dont il fut le créateur, et poursuivait sa quête philosophique vers le bien absolu, sans ordres prêcheurs… Une liberté précieuse, elle aussi gagnée de la « force de l’esprit ».

Les Radicaux de Gauche avaient honoré Stéphane HESSEL.

 

Stéphane Hessel reçoit le Prix Jean Zay par Jean-Michel Baylet

Dans les salons du restaurant Le Procope à Paris, Jean-Michel Baylet, président du PRG, avait remis le 4 décembre 2008 le prix Jean Zay à Stéphane Hessel pour son livre de conversation avec le journaliste Jean-Michel Helvig « Citoyen sans frontières » (Fayard).

Ce prix, a été  créé par le Parti radical de gauche en 2005 pour célébrer le centième anniversaire de la loi de séparation des églises et de l’état.

Les membres du jury présidé par Nina Moati, ainsi que la fille de Jean Zay, entouraient le lauréat.

Ancien ambassadeur, Stéphane Hessel s’était illustré dans la Résistance, la décolonisation, pour la défense du Tiers-Monde et de l’Europe. « C’est pour moi un honneur de vous recevoir.Vous êtes le symbole de la laïcité et de la démocratie »,lui  avait je déclaré en lui remettant  un fac similé de la une de « La Dépêche » du 7 décembre 1905 ainsi qu’un chèque d’un montant de 1 905 € !

19/02/2013

Intervention de Jean Michel BAYLET au Sénat concernant les emplois d'avenir.

Monsieur le président,
Messieurs les ministres,
Mes chers collègues,

 

A l’occasion de la présentation de ses vœux aux Français, le Président de la République, sans occulter les difficultés rencontrées par notre pays et par nos concitoyens, a souhaité insister sur les priorités qui guideront l’action du Gouvernement en 2013 : « Voilà, le cap est fixé : tout pour l’emploi, la compétitivité et la croissance. » Et d’ajouter : « Ce cap sera tenu. Contre vents et marées. Je n’en dévierai pas. Non par obstination, mais par conviction. C’est l’intérêt de la France. »

Depuis son entrée en fonction, le Gouvernement a fait du combat pour l’emploi sa priorité. C’est dans cette perspective que doivent être appréhendés les textes que le Parlement a déjà votés : loi portant création des emplois d’avenir et loi de finances rectificative pour 2012, qui crée le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.

Avant d’entrer dans l’examen au fond des principales dispositions de ce projet de loi, permettez-moi de revenir sur la méthode qui a prévalu à son élaboration. Elle constitue selon moi une avancée majeure, qu’il faut souligner.

Sans retracer la genèse du contrat de génération, je rappellerai néanmoins qu’elle est née de la volonté de François Hollande, qui la défendit dès la campagne des primaires citoyennes, avant de l’intégrer logiquement dans son programme présidentiel.

Mes chers collègues, le texte dont nous débattons ce soir est en outre le fruit d’un processus entamé lors de la grande conférence sociale qui s’est tenue les 9 et 10 juillet 2012. Cette dernière a marqué le début de négociations entre les partenaires sociaux, qui, sous l’égide du Gouvernement et, en particulier, de Michel Sapin, sont parvenus à un accord national interprofessionnel le 19 octobre dernier, et ce – j’insiste sur ce point – à l’unanimité des organisations représentatives.

Cet accord n’est évidemment pas le premier, mais il illustre la volonté de l’exécutif d’associer les partenaires sociaux à l’élaboration des grands chantiers du quinquennat, le texte initial du Gouvernement reprenant très largement les termes de l’accord. C’est la même méthode qui a été utilisée s’agissant de la sécurisation des parcours professionnels : elle a abouti le 11 janvier 2013 à un autre accord national interprofessionnel, qui donnera lieu à un texte de loi dont nous débattrons prochainement.

Reconnaissez-le, mes chers collègues, cette approche constitue une indubitable rupture par rapport à celle qui fut privilégiée par le précédent exécutif. Loin de penser que cette façon de procéder rogne sur les prérogatives des assemblées, j’estime au contraire qu’une telle démarche enrichit notre travail, dans la mesure où notre institution conserve la possibilité d’améliorer le texte, dans l’esprit de l’accord.

Venons-en au diagnostic ayant présidé à la création de ce dispositif. Il repose sur le double constat mis en lumière par l’étude des statistiques relatives à l’emploi, qui montrent une nette inflexion de la courbe du taux d’activité chez les 15-24 ans et les 55-64 ans.

Ce constat, connu de longue date, est partagé sur l’ensemble des travées de notre assemblée. Le phénomène s’est même amplifié en ces années de crises, avec son lot de retraites anticipées pour les uns et de chômage ou de contrats précaires pour les autres.

Les chiffres sont éloquents : atteignant selon l’INSEE 25 % au troisième trimestre 2012, soit un jeune sur quatre, le taux de chômage des 15-24 ans est 2,5 fois supérieur à celui de l’ensemble de la population.

L’emploi des jeunes est, depuis au moins une trentaine d’années, une inquiétude pour les gouvernements successifs, qui ont multiplié les dispositifs en sa faveur. Nous le savons, les difficultés rencontrées par les jeunes pour s’insérer dans le marché du travail, outre leurs aspects économiques et sociaux, ont une dimension symbolique. Elles interrogent notre société sur sa capacité à offrir à ses enfants un avenir meilleur que celui de leurs parents.

C’est ainsi que, dès 1977, Raymond Barre, alors Premier ministre, prit les premières mesures en faveur du travail des jeunes. S’ensuivit une succession de sigles et autres acronymes derrières lesquels se cachaient autant de dispositifs qui connurent plus ou moins de succès : les TUC, les CIE ou les CPE…

Par ailleurs, à l’autre bout du monde du travail, les travailleurs âgés sont également confrontés, à partir de cinquante-sept ans, à une baisse de leur taux d’activité. D’où la nécessité de mener une politique de l’emploi spécifique à destination des salariés âgés, afin de faire disparaître les périodes d’inactivité forcée auxquelles ils peuvent être confrontés dans les dernières années de leur vie professionnelle et de relever, dans la lignée des orientations établies au niveau européen, leur taux d’emploi.

Longtemps, les politiques de l’emploi ont appréhendé de manière distincte ces formes de chômage et ces faibles taux d’activité. Il a même parfois été considéré que les travailleurs âgés devaient laisser leur place et leur travail aux jeunes. Une des innovations majeures de votre texte, monsieur le ministre, est d’associer les deux extrémités de la pyramide des âges du monde du travail, là où on se contentait auparavant de les opposer.

Outre la méthodologie, l’autre nouveauté introduite par ce projet de loi est en effet le postulat selon lequel le maintien dans l’emploi des travailleurs âgés n’est pas un frein à l’entrée des jeunes dans le monde du travail. Mieux, le texte du projet de loi lie les deux générations par le biais de la transmission des savoirs et des compétences.

En octobre 2010, lors de l’examen par notre assemblée du texte portant réforme des retraites, notre groupe avait déposé un amendement qui préfigurait une telle alliance des générations. Nous avions en effet proposé l’introduction d’un article visant à inciter le développement de la fonction de tuteur, exercée par des salariés de cinquante-cinq ans ou plus, pour participer à la formation de jeunes embauchés en contrat de professionnalisation. Le dispositif ainsi proposé différait quelque peu du contrat de génération, car, avec le contrat de professionnalisation, il concernait un contrat aidé – ce que n’est pas le contrat de génération –, mais l’idée de retisser le lien entre les générations autour d’une transmission d’expérience était déjà bien là.

Nous fondant sur les conclusions du rapport très complet de notre collègue Christiane Demontès, nous pouvons dire qu’une telle articulation sera une première en Europe.

Mes chers collègues, l’un des enjeux des contrats de génération a concerné la définition des publics éligibles. S’agissant du versant « jeunes », la limite d’âge a été fixée à vingt-six ans. À la différence des emplois d’avenir, aucune limite en termes de diplômes n’est fixée, ce qui correspond aux différents publics visés par ces deux mécanismes. Nous avons tiré les enseignements des emplois jeunes : pensés initialement pour les jeunes peu ou pas diplômés, ils furent largement mobilisés pour l’embauche de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur.

Outre le fait de donner un « coup de pouce » à l’embauche d’un jeune, le principal atout du dispositif est de permettre que les moins de vingt-six ans, plutôt habitués aux contrats courts, stages et autres contrats à durée déterminée, CDD, puissent être embauchés en contrats à durée indéterminée, CDI. C’est un réel progrès, alors même que les jeunes constituent la tranche d’âge la plus touchée par les emplois précaires.

Le groupe radical avait souhaité déposer un amendement visant à étendre l’âge limite du dispositif au profit des jeunes diplômés ayant obtenu un doctorat. Ces derniers, parce qu’ils ont mené des études approfondies, entrent plus tardivement sur le marché du travail. De surcroît, en dépit du niveau de leurs études, ils peuvent éprouver des difficultés pour s’insérer. C’est la raison pour laquelle nous proposions qu’ils puissent être éligibles aux contrats de génération jusqu’à la veille de leurs trente ans. Je regrette que ledit amendement ait été frappé d’irrecevabilité.

Les travailleurs âgés, eux, pourront être concernés par les contrats de génération à partir de cinquante-sept ans, âge à partir duquel le taux d’activité chute. Il s’agit d’un outil important pour le maintien dans l’emploi. Nous connaissons en effet les grandes difficultés rencontrées par ces personnes, qui sont dans la quasi-impossibilité de retrouver un emploi après un licenciement.

Comme le Gouvernement en a pris l’habitude, un volet du projet de loi concerne plus spécifiquement les personnes handicapées, qui peuvent bénéficier des contrats de génération jusqu’à trente ans et à partir de cinquante-cinq ans.

En étudiant les dispositifs mis en place en direction des entreprises, on constate qu’il existe non pas un mais plusieurs contrats de génération. Pour les entreprises de moins de cinquante salariés et celles qui comptent entre cinquante et trois cents salariés, la prime de 4 000 euros par an – 2 000 euros pour l’emploi d’un jeune et autant pour le maintien d’un senior – constitue une véritable aide à l’embauche.

Pour les entreprises moyennes, cette aide sera subordonnée à un accord « intergénérationnel » dans l’entreprise ou dans la branche. Elle ne permettra évidemment pas à elle seule de justifier une embauche, mais elle aidera les petites et moyennes entreprises qui hésitent à recruter à franchir le pas, de surcroît en offrant un CDI, puisqu’elle permet une baisse d’environ 20 % du coût du travail pour un salarié rémunéré au SMIC.

Par ailleurs, il faut souligner le dispositif plus spécifique des contrats de génération destinés à la transmission d’entreprise, notamment des TPE ou des entreprises artisanales. On sait en effet que la période de la transmission est souvent source de turbulences et d’incertitudes. Un chiffre interpelle : 63 % des sociétés artisanales ne sont pas reprises lors d’un départ à la retraite. Avec le contrat de génération, on permet donc un accompagnement et une transmission en douceur.

Pour les entreprises plus grandes, de plus de trois cents salariés, les partenaires sociaux en sont tombés d’accord, les contrats de génération n’ouvriront pas droit à une aide. Ils devront faire l’objet d’un accord collectif d’entreprise ou d’un plan d’action. Ainsi, le dialogue social, mis à contribution pour l’élaboration de la loi, le sera également lors de sa mise en œuvre. En cas d’absence d’accord collectif ou de plan d’action, une pénalité pourra s’appliquer.

Ce faisant, le coût des contrats de génération sera contenu. Il est néanmoins estimé à 880 millions d’euros, à vitesse de croisière, à l’horizon 2016, pour un nombre de contrats d’environ 500 000. Leur financement sera intégré au pacte de compétitivité, mais n’entamera pas l’enveloppe allouée au CICE.

Eu égard au caractère novateur du dispositif et à la nécessité de procéder à son évaluation, l’Assemblée, nationale a amendé le texte du Gouvernement, y ajoutant un article 6. Celui-ci prévoit que, chaque année, à compter du 30 juin 2014, le Gouvernement déposera un rapport au Parlement sur la mise en œuvre du contrat de génération.

Cet article tend à imposer un suivi de l’état d’application et de l’efficacité des dispositifs du projet de loi, ainsi que du nombre d’emplois créés. Notre rapporteur a fait adopter, lors de l’examen du texte en commission, un amendement visant à étendre cette analyse aux bornes d’âge.

Des modalités de modification de la loi sont également prévues trois ans après l’entrée en vigueur du présent texte. Nous aurons, à ce moment-là, l’occasion de revenir sur son ratio coût-efficacité.

Disons-le clairement, mes chers collègues, les contrats de génération, à eux seuls, ne permettront pas de faire baisser tendanciellement le chômage dans notre pays, mais nous devons considérer qu’ils s’inscrivent dans un ensemble de dispositifs de lutte pour la compétitivité, la croissance et l’emploi.

Le futur débat sur la traduction législative de l’accord du 11 janvier dernier sera la prochaine étape de cette « bataille pour l’emploi », pour reprendre le vocable du ministre lui-même.

Mais d’autres chantiers ont été lancés ou s’ouvriront dans les prochains mois. Je pense notamment à une véritable réforme de la formation professionnelle.

Au cours de l’examen du présent texte en commission, M. Repentin, ministre délégué à la formation professionnelle, a précisé que le contrat de génération prenant la forme d’un CDI ouvrirait l’accès au plan de formation de l’entreprise. Ce secteur, toutefois, ne pourra pas faire l’économie d’une vaste remise en question.

Je pense enfin au pacte pour l’artisanat, présenté en conseil des ministres le 23 janvier dernier. « Sept enjeux stratégiques » y sont mis en avant. Nous pouvons citer les deux premiers, qui entrent en résonance avec les thématiques dont nous débattons aujourd’hui : il s’agit, d’une part, de faciliter la reprise d’entreprise et la transmission des savoir-faire et, d’autre part, d’inciter les jeunes à s’orienter vers les filières de l’artisanat et de renforcer l’attractivité de ces métiers parfois méconnus ou confrontés à des pénuries de main-d’œuvre.

Mes chers collègues, au cours de la discussion des articles, notamment de l’article 1er, le groupe du RDSE vous proposera d’apporter quelques améliorations au texte transmis par la commission. Mais, à ce stade, nous ne pouvons que constater que ce projet de loi porte la marque du pragmatisme et du bon sens. L’idée d’allier les générations était séduisante ; sa mise en œuvre, qui associe l’ensemble des partenaires sociaux, est adaptée en fonction des différentes tailles des entreprises, afin d’éviter au maximum les effets d’aubaine.

Pour ces raisons, les sénateurs radicaux de gauche et la majorité du groupe RDSE apporteront naturellement leur appui à ce texte. Ils soutiendront aussi, et de manière forte, le Gouvernement dans son combat pour la compétitivité, la croissance et l’emploi.