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17/04/2012

Jean Michel BAYLET cite JAURES...

 

François Hollande sur les traces de Jaurès

J’étais hier avec Vincent Garel, président de la fédération PRG du Tarn, et Raymond Vall, sénateur PRG du Gers, aux côtés de François Hollande à Albi puis à Carmaux.

 

Le candidat de la gauche à l’élection présidentielle a rendu hommage à Jean Jaurès. J’ai rappelé à cette occasion que Carmaux était dans « une région dont le cœur est à gauche, éprise de justice et de progrès » et j’ai insisté sur l’héritage de Jaurès « qui fut l’une des plumes de La Dépêche », « défenseur des mineurs de Carmaux, initiateur de la Verrerie, coopérative ouvrière », attaché à la République et à la laïcité.

Mon discours du 16 avril à Carmaux

« C’est une très grande joie pour nous tous, mais aussi une grande fierté, de t’accueillir, mon cher François, dans notre grand Midi républicain, cette région dont le cœur est à gauche car elle est, depuis longtemps, éprise de justice, de progrès, et heureuse d’avoir inventé la convivialité, le vivre-ensemble.

C’est aussi un grand honneur, Monsieur le Maire, de nous retrouver chez vous, à Carmaux, berceau d’un des tout premiers syndicats de mineurs et terre d’élection de l’immense Jean Jaurès. Et Jaurès n’est pas inerte dans notre mémoire. Sa figure vaut comme une prémonition. Elu radical de Toulouse, devenu socialiste après la grande grève de 1892, il résume en somme toute la gauche, toute sa force lorsque ses différentes sensibilités savent se rassembler.

Mais c’est aussi, pardonnez-moi de le dire, avec une émotion personnelle particulière que j’évoque Jean Jaurès qui fut, pendant trente années, la grande plume de La Dépêche. Le jour même de son assassinat, ce terrible 31 juillet 1914, La Dépêche publiait un de ses articles, une vigoureuse mise en garde contre la guerre déjà en marche. Décidément oui, nous avons tous Jean Jaurès en patrimoine commun.

Et il continue à nous délivrer ses leçons. Défenseur des mineurs de Carmaux, promoteur de la verrerie ouvrière d’Albi, initiateur de la première coopérative viticole languedocienne, il avait foi dans la communauté des hommes, dans la puissance des grands projets collectifs, dans les vertus de l’instruction républicaine, dans l’utilité des services publics qu’il défendait contre Jules Guesde lui-même. Il croyait en l’unité fondamentale de la condition humaine et jugeait indissociables la liberté, l’égalité, la fraternité, mais aussi la laïcité.

Il avait également claire conscience de la force réactionnaire des puissants coalisés qui étaient ses seuls véritables adversaires. Ce rappel n’est pas inutile, cher François, dans un moment où la droite se livre au plus odieux des chantages sur les citoyens. Demain, nous dit-on, ton élection, que nous espérons, que nous attendons, que nous voulons tous, déclencherait une sorte de guerre de la spéculation financière, un bombardement de notre économie et de nos finances publiques.
Eh bien non ! Messieurs Sarkozy, Fillon et autres, nous ne sommes pas en guerre. Comme Jaurès nous la refusons. Mais nous vous mettons en demeure d’expliquer aux Français cette lamentable contradiction : comment le sortant autoproclamé « candidat du peuple » peut-il être en même temps le préféré des banquiers, des marchés et du Medef ?

Nous ne voulons pas de ces oppositions ridicules et caricaturales. Nous avons le ferme espoir d’une large majorité constituée pour la victoire de François Hollande et, au-delà, d’une France enfin
réconciliée avec le meilleur d’elle-même.

Notre étape de Carmaux illuminée par l’esprit de Jaurès s’inscrit dans le long chemin qu’à travers mille épreuves notre pays a suivi pour aller vers cet horizon où la justice s’épanouit toujours plus. Il va des philosophes des Lumières jusqu’à notre combat d’aujourd’hui. Il passe par la Révolution bien sûr qui n’est pas seulement, n’en déplaise à Jean-Luc Mélenchon, celle de Robespierre et de Saint-Just mais aussi celle de Sieyès et Condorcet. Par les journées de juillet 1830. Par la révolution de 1848 et les conquêtes de l’éphémère II° République et l’exil de Victor Hugo. Par la commune de Paris le temps des cerises et le bagne pour Louise Michel. Par les combats des républicains pour l’école, pour les libertés associatives et syndicales, pour la séparation des églises et de l’Etat. Et il passe encore par l’énergie de Clemenceau au service de l’intégrité territoriale. Par les conquêtes sociales du Front Populaire. Par l’esprit de la Résistance. Et par les immenses progrès auxquels nous avons eu la chance et l’honneur de contribuer grâce à François Mitterrand.

C’est tout ce magnifique héritage qu’il te revient aujourd’hui, mon cher François, de porter en y ajoutant encore ta force de caractère contre les crises déclarées ou imminentes mais aussi ton humanité que je sais rayonnante et chaleureuse, et même contagieuse, pour faire disparaître de notre société les mauvais germes de haine et de division que d’autres y ont semés.

Pour moi, je n’ai pas le moindre doute. Aussi impressionnant qu’il soit, ce flambeau, tu sauras le relever. Et tu sauras le porter plus loin car la République est un projet toujours inachevé, une merveilleuse insatisfaction. Et dans trois semaines, j’en suis certain, les Français seront émerveillés de se découvrir encore capables de rêver, d’inscrire leurs rêves dans la réalité, de parler, par-delà les frontières et les différences, à toute l’humanité et de se réveiller le 7 mai au matin avec un nouveau Président de la République. Vous connaissez tous son nom : François Hollande ».

11/04/2012

Jean Michel Baylet s'exprime dans Le Figaro.

Toulouse : l’émotion et la raison

mercredi 11 avril 2012

La France a été littéralement submergée par l’émotion qu’ont provoquée les épouvantables tueries de Toulouse et de Montauban. Et notre pays s’est montré uni dans cette émotion collective, faite à la fois de compassion pour les victimes et leurs familles et d’incompréhension devant la barbarie des actes perpétrés. La fusion émotionnelle était aussi un réconfort : notre grand pays était capable de se rassembler autour des familles éplorées mais aussi autour de nos valeurs communes agressées.

C’est un lieu commun de dire que l’émotion ne ferait pas bon ménage avec la raison, qu’elle produirait en somme un aveuglement. L’épreuve que nous venons de traverser et dont nous ne sommes pas sortis démontre que ce postulat est infondé. Les Français ont été évidemment pétrifiés par l’horreur. Ils ont communié dans une souffrance bien facile à comprendre et difficile à vivre. Comme on l’a justement dit, ces enfants étaient les nôtres, leur père enseignant était des nôtres et les soldats tués, bien sûr, étaient les nôtres, eux aussi. Ce grand malheur était notre tragédie commune et il faut se féliciter d’avoir vu tous les dirigeants du pays observer, si l’on excepte quelques polémiques marginales et peu décentes, retenue et dignité, solidarité et fermeté.

On doit rendre hommage aux communautés atteintes dans ce qu’elles ont de plus cher. La communauté judaïque, comme aux heures les plus sombres de notre Histoire. La communauté musulmane frappée d’un double malheur, celui de comporter en son sein à la fois des victimes et leur tueur. L’institution militaire enfin, visée en l’occurrence comme un symbole de notre République. Aucune de ces communautés humaines ne s’est laissée emporter par la haine, par un quelconque désir de vengeance collective, ou par la tentation de se trouver un ennemi autre que le fou qui est mort de sa folie.

Tous ont montré l’exemple de la fermeté de l’âme humaine quand elle fait confiance à des valeurs qui rassemblent les hommes et qu’elle condamne les fureurs qui veulent les opposer. C’est l’honneur de la République que de résister fermement mais avec humanisme à tous ceux qui croient pouvoir spéculer pour en abuser sur la supériorité morale qu’ils nous prêtent. La France républicaine est forte d’une morale plus élevée que la leur. Elle ne fait pas fi de la vie. Elle croit à la justice et au droit. Et elle en offre même les garanties à ses pires ennemis. Jusque dans la souffrance, cette France est belle, telle que nous l’aimons.

Mais en disant quelle a été notre émotion, devrions-nous pour autant renoncer à la raison ? Qu’il soit permis ici à quelqu’un dont toutes les racines se trouvent entre Toulouse et Montauban de délivrer un message simple : ce serait méconnaître toutes les traditions de cette grande et belle région de croire que l’affliction la plus sincère ne pourrait s’accommoder du libre exercice de la raison discursive et du doute méthodique qui nous ont été légués en héritage par le mouvement des Lumières.

L’émotion ne s’affaiblit ni ne s’oublie lorsque force reste à la raison. Nous sommes, chacun le sait, dans une période électorale capitale. Et l’unité que nous avons éprouvée n’abolit pas nos différences politiques ; elle ne supprime pas la confrontation de nos projets en vue du bien public ; elle n’efface pas nos divergences d’analyse sur l’état de la société française. Nous croyons cependant, et la gauche le croit plus encore à la lumière des événements dramatiques récents, que la France est forte lorsqu’elle est rassemblée, lorsque toutes ses communautés refusent la tentation du communautarisme pour se dépasser dans un grand projet collectif commun, dans une société réconciliée, solidaire et généreuse.

C’est pourquoi il faut mettre en garde ceux qui voudraient utiliser en l’exacerbant l’émotion qui nous occupe encore. On ne répondra pas aux attentes très concrètes des Français soucieux de leur vie quotidienne en gesticulant sans relâche comme pour prolonger la séquence tragique récemment vécue. Arrêter à chaud des islamistes connus de longue date, qu’ils soient réellement des comploteurs dangereux ou des djihadistes de pacotille, ne sert ni la démocratie ni les valeurs dont nous avons démontré la force et la résistance. Essayer d’installer l’effroi et le sentiment d’insécurité au cœur de la campagne électorale est une méthode anxiogène ne démontrant que la peur de ceux qui mobilisent des épouvantails pour dissimuler la réalité de leur action. Parler, même en un lapsus, de « musulmans d’apparence » c’est contredire tous les discours tenus sur l’unité de la nation et sur la laïcité de la République.

Revenons à la raison en gardant intacte notre émotion. Les victimes de Montauban et Toulouse nous demandent des comptes. Sur les causes du drame, les victimes nous imposent d’agir, pas de nous agiter. Elles nous implorent de nous unir, pas de nous diviser. Elles exigent que nous soyons dignes d’elles puisqu’elles ont pu nous ordonner un vrai moment de dignité commune.

Ceux qui dirigeront notre pays seront d’abord jugés sur leur capacité à observer le double respect de l’émotion et de la raison. Et l’espérance s’enracinera, soyons en certains, dans les souffrances vécues par le pays, dans ce moment de douloureuse et miraculeuse unité.